Le Visuel et le Sonore

Peinture et musique au XXè siècle

Pour une approche épistémologique
Textes recueillis par Gérard Denizeau

Musique et Musicologie n°28 - Edition Librairie Honoré Champion

"Cet ouvrage fondé sur les travaux et les réflexions d’historiens d’art, musicologues et créateurs attentifs aux liens unissant arts visuels et musique dans l’histoire, propose une approche plus épistémologique qu’événementielle de ces rapports….

…. Mais aussi sur les mutations des images sensorielles telles que les manient des compositeurs aussi affirmés qu’Henri Dutilleux, Olivier Messiaen (lequel, en retour, inspire directement Guetty Long) ou François Bayle…."

… En accord aves les proportions d’une œuvre de musique de chambre, Guetty Long a choisi un art en quelque sorte intime pour traduire le "Quatuor" de Messiaen, celui de la gravure. Mais une première différence est à relever : le nombre de dix gravures, soit deux de plus que le nombre de mouvements du "Quatuor". Sans rapport avec la musique, les deux planches qui ont été ajoutées, "Hommage à Olivier Messiaen" et "Quatuor pour la fin du Temps", en ont un, cependant, avec l’idéal du compositeur et les circonstances de la composition : dans la première planche sont rassemblés les principaux thèmes d’inspiration du compositeur – la nature, l’amour humain, l’amour divin ; dans la seconde planche est évoquée la prison où Messiaen a composé le "Quatuor" et où sont réunis les quatre instrumentistes.

L’étude comparative de deux mouvements du "quatuor pour la fin du Temps" permet de constater que Guetty Long a rejoint Olivier Messiaen au plus près de ses intentions et de son langage. Nombre d’éléments formels, mélodiques et rythmiques, s’y retrouvent, de même que les caractères expressifs et la signification profonde. La sobriété, la spiritualité, le message d’espérance sont quelques-uns des aspects majeurs du Quatuor retenus par Guetty Long pour ses gravures. Cependant, il ne s’agit pas d’une imitation servile, ou d’une simple illustration. Guetty Long ne cesse d’obéir à la logique interne de son art. Aussi son œuvre peut-elle se soutenir seule, sans le support musical. Sa signification n’en est pas diminuée pour autant même si le propos n’est pas exactement le même que celui du compositeur.

La confrontation de la musique et de la peinture, à travers l’exemple que nous avons choisi comme dans de nombreux autres, peut renforcer la compréhension des œuvres les unes par les autres. Elargir le champ de la connaissance et de la création est sans doute l’un des mérites de la transposition d’art si fréquente aujourd’hui.

Michèle Barbe

(Professeur à l’Université de Paris IV,
Responsable du Groupe d’études Musique et arts plastiques)